Sélection de la langue

Recherche

Alerte opérationnelle : Blanchiment des produits provenant du cannabis illicite

Numéro de référence : CANAFE-2022-OA002
Septembre 2022

Objectif

L'objectif de la présente alerte opérationnelle est d'aider les entités déclarantes à reconnaître les opérations financières qui seraient liées au blanchiment des produits d'activités criminelles associées au cannabis illicite. Grâce aux déclarations d'opérations financières, CANAFE est en mesure de faciliter la détection, la prévention et la dissuasion du financement des activités terroristes et du blanchiment d'argent à toutes les étapes (placement, dispersion et intégration) en fournissant des renseignements financiers exploitables aux organismes d'application de la loi et de sécurité nationale. La présente détaille une série d'indicateurs conçus par CANAFE à la suite d'une analyse des déclarations d'opérations douteuses (DOD) concernant le blanchiment des produits d'activités associées au cannabis illicite.

Projet Legion

Il s'agit d'un partenariat public-privé dirigé par La Banque Toronto-Dominion (TD), et soutenu par les organismes d'application de la loi du Canada et par CANAFE. Le projet Legion cible les activités illicites liées au cannabis en se concentrant sur le volet blanchiment d'argent associé à ces crimes. L'objectif du projet est d'accroître la sensibilisation et d'améliorer la détection à l'égard du blanchiment des produits découlant d'activités illicites liées au cannabis.

Contexte

La Loi sur le cannabis, qui établit le cadre légal contrôlant la production, la distribution, la vente et la possession du cannabis à l'échelle du Canada, est entrée en vigueur le 17 octobre 2018.

Seuls les titulaires d'une licence fédérale relative au cannabis sont autorisés à cultiver du cannabis aux fins de vente pour veiller à ce que tous les produits de cannabis légaux respectent des exigences strictes en matière de contrôle de la sécurité et de la qualité des produits. Les provinces et territoires, quant à eux, sont responsables de la réglementation et des restrictions concernant la vente et la distribution du cannabis. Chaque province et territoire du Canada maintient une liste officielle des magasins de cannabis autorisés sur leur territoire respectif.

Malgré l'entrée en vigueur de la Loi sur le cannabis, les activités non autorisées liées au cannabis ne se sont pas estompées. Selon l'Enquête canadienne sur le cannabis de 2021, 81 % des répondants obtiennent leur cannabis de sources légales ou autorisées, ce qui inclut les détaillants et points de vente réglementés ou autorisés. Inversement, 37 % des répondants à l'enquête obtiennent leur cannabis de sources illégales ou non autorisées, ce qui inclut les détaillants et points de vente non réglementés ou non autorisés. Puisque les répondants pouvaient choisir plus d'une source, certains ont indiqué s'approvisionner en cannabis auprès de fournisseurs légaux et illégaux.

Bien que davantage de consommateurs déclarent chaque année obtenir leur cannabis auprès de sources légales, il demeure que le marché illégal du cannabis est florissant au Canada. Un tel marché contribue à la hausse du risque de torts à l'encontre de la population et du système financier du Canada par d'importantes pertes de recettes fiscales et un accroissement du financement des activités criminelles de groupes du crime organisé.

Qu'est-ce que le cannabis illicite?

Du cannabis illicite réfère à du cannabis qui est ou qui a été vendu, produit ou distribué par une personne visée par une interdiction prévue par la Loi sur le cannabis ou par une loi provinciale ou qui a été importé par une personne visée par une interdiction prévue par la Loi sur le cannabis.

Aperçu de l'analyse de CANAFE des DOD liées au cannabis illicite

CANAFE a analysé un échantillon d'environ 5 000 DOD reçues entre mars 2020 et mars 2021 concernant des activités liées au cannabis illicite. La majorité de ces DOD touchait la vente et la distribution soupçonnées de cannabis illicite par l'entremise de distributeurs en ligne non autorisés. D'ailleurs, CANAFE a aussi examiné des DOD portant sur la production soupçonnée de cannabis illicite.

Méthodes générales de blanchiment d'argent

Dans l'ensemble, les virements par courriel, chèques, traites bancaires, et dépôts ou retraits en espèces étaient les principaux moyens utilisés pour déplacer des fonds découlant d'activités liées au cannabis illicite. De plus, CANAFE a observé le recours à plusieurs méthodes de blanchiment d'argent, dont l'utilisation de monnaies virtuelles, de prête‑nomsNote de bas de page 1, de la dispersion de fonds entre comptes liés, et de sociétés-écrans appartenant aux distributeurs et aux producteurs de cannabis illicite.

L'on a constaté que des virements de fonds entrants provenant de courtiers en monnaies virtuelles dans des comptes bancaires faisaient référence à de la terminologie propre au cannabis (exemples : herbe, pot, cocotte et feuille). Ces fonds ont par la suite été rapidement transférés de ces comptes bancaires à d'autres courtiers en monnaies virtuelles.

Des prête-noms ont reçu dans leurs comptes bancaires un nombre excessif de virements de fonds provenant d'entreprises ou de personnes soupçonnées de faire de la distribution en ligne, fonds qu'ils viraient ensuite à un compte personnel détenu par les signataires autorisés des entités. Certains prête-noms possédaient des comptes conjoints avec des personnes impliquées ou soupçonnées d'être impliquées dans la vente de cannabis illicite.

Un large éventail de types d'entreprises servait de sociétés-écrans pour blanchir les produits d'activités liées au cannabis illicite. Les entreprises les plus fréquemment observées dans ce contexte sont celles de commerce électronique associées aux secteurs des produits de beauté et du mieux-être, de la vente en gros d'aliments et de boissons, de l'automobile, de la réparation d'appareils électroniques, du marketing, de la publicité et du service-conseil, et de la construction. Souvent, il y avait peu d'opérations commerciales, ou aucune opération, dans les comptes détenus par ces sociétés-écrans qui appartenaient à des distributeurs et producteurs soupçonnés de cannabis illicite, leurs associés et d'autres membres de leurs réseaux. Bon nombre de ces personnes possédaient plus d'une entreprise et viraient des fonds entre leurs comptes personnels et d'entreprise et ceux de leurs associés, sans motif clair.

À la suite de la fermeture d'un compte d'entreprise, CANAFE a noté que l'on a observé l'ouverture ou l'utilisation d'un autre compte à une institution financière différente après un court laps de temps. L'on a également remarqué que ce qui semblait être des personnes tierces non liées commençait à recevoir des virements par courriel comportant la même adresse courriel ou le même nom que le distributeur non autorisé une fois le compte de ses associés fermés.

Distributeurs en ligne non autorisés

Les opérations douteuses qui suivent sont associées à des activités en ligne liées au cannabis illicite, comme la vente et la distribution.

Des volumes excessifs de virements entrants par courriel provenant de nombreux tiers non liés (acheteurs au détail soupçonnés) représentaient la majorité des dépôts dans les comptes bancaires personnels et d'entreprise. Les renseignements sur le versement d'un bon nombre de ces virements contenaient du jargon associé au cannabis (exemples : herbe, pot, cocotte et feuille), référaient à un distributeur en ligne non autorisé, ou présentaient fréquemment une série de chiffres et de lettres ressemblant à des numéros de commande.

Un distributeur en ligne non autorisé tenterait de masquer la raison des envois de fonds illicites en demandant aux clients d'effectuer les virements à diverses adresses courriel ou à divers numéros de téléphone d'entreprises. Les fonds sont ensuite acceptés dans son compte bancaire associé à des adresses courriel ou à des numéros de téléphone différents.

Des réseaux de sociétés à numéro gèrent des comptes soupçonnés de servir d'intermédiaires pour des distributeurs non autorisés. Même si ces entités évoluaient dans des secteurs bien différents, elles étaient liées par des flux financiers, des coordonnées communes pour les virements par courriel ou les mêmes signataires autorisés. Les administrateurs ou signataires autorisés de ces sociétés à numéro sont fréquemment de jeunes personnes indiquant être étudiantes, sans emploi ou travailleuses dans l'industrie du service ou du divertissement.

Les comptes soupçonnés d'appartenir à des distributeurs en ligne non autorisés comportent un nombre excessif d'achats auprès d'entreprises offrants des services d'emballage et d'expédition, probablement en vue de livrer des produits à des clients. Un exemple serait l'achat en gros d'emballages à humidité contrôlée provenant de fournisseurs spécialisés ou de détaillants d'emballages pour aliments. Ce type d'achats a aussi été observé dans les comptes de producteurs soupçonnés de cannabis illicite.

Culture, transformation et préparation du cannabis illicite

L'on soupçonne également que des opérations étaient liées à la culture, à la transformation et à la préparation du cannabis illicite.

Les paiements excessifs et atypiques de services publics peuvent pointer à des activités de culture non autorisée du cannabis. CANAFE a ainsi noté les paiements de services publics effectués en espèces au montant exact des factures, ou à un montant arrondi. D'autres paiements atypiques de services publics constatés sont réalisés par une personne pour de multiples comptes d'électricité, ou par plusieurs personnes pour un même compte, pour des factures dont le montant dépasse ce qui serait attendu des clients compte tenu de leur adresse et de leur emploi déclaré.

En outre, ces paiements de services publics étaient régulièrement combinés à d'importants achats auprès d'entreprises vendant des marchandises connues pour être utilisées dans le secteur du cannabis (comme des magasins de matériel hydroponique ou de jardinage, des quincailleries et des détaillants de produits d'éclairage). D'ailleurs, des achats importants auprès de confiseries ou de magasins d'équipement de cuisine qui ne cadrent pas avec les activités commerciales attendues d'un client suggèrent que la personne puisse être impliquée dans la fabrication de produits comestibles faits à partir de cannabis illicite.

Motifs raisonnables de soupçonner et utilisation des indicateurs

Pour déterminer si elles doivent transmettre une DOD à CANAFE (pour une opération financière réalisée ou tentée), les entités déclarantes doivent se fier à plus qu'une « intuition » ou un « pressentiment », même si aucune preuve de blanchiment d'argent n'est requise. Elles doivent fonder leur décision sur les faits, le contexte et les indicateurs de blanchiment d'argent associés à l'opération. Lorsque ces éléments sont considérés conjointement, ils brossent un portrait essentiel pour distinguer ce qui pourrait être suspect et ce qui pourrait être raisonnable dans une situation donnée. Les entités déclarantes doivent avoir des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération, réalisée ou tentée, est liée à la perpétration ou à la tentative de perpétration d'une infraction de blanchiment d'argent avant de soumettre une DOD à CANAFE.

Les indicateurs de blanchiment d'argent peuvent être considérés comme des signes d'alerte que quelque chose semble clocher. Les signes d'alerte sont habituellement associés à un ensemble de caractéristiques, comportements, tendances et autres facteurs contextuels liés à des opérations financières qui donne l'impression qu'elles sont incohérentes par rapport à ce qui est attendu ou considéré comme normal. Seul, un indicateur n'est pas forcément suspect au départ. Toutefois, il pourrait mener une entité déclarante à se questionner sur la légitimité d'une opération, pour ensuite l'examiner afin de déterminer si d'autres faits, éléments contextuels ou indicateurs de blanchiment d'argent ou de financement des activités terroristes y sont associés. Le cas échéant, les soupçons de l'entité déclarante pourraient croître au point où il serait nécessaire de transmettre une DOD à CANAFE (consultez la directive de CANAFE sur la déclaration d'opérations douteuses).

Indicateurs de blanchiment d'argent

Vous trouverez ci-dessous des indicateurs de blanchiment d'argent propre aux activités liées au cannabis illicite qui découlent de l'analyse de CANAFE et qui tiennent compte des types et des tendances des opérations, ainsi que des facteurs contextuels, ce qui renforce l'importance de bien connaître ses clients.

Ces indicateurs ne doivent pas être considérés de manière isolée : seuls, ils n'indiquent pas forcément qu'il y a présence de blanchiment d'argent ou d'autres activités douteuses. Les entités déclarantes doivent donc les examiner en combinaison avec l'information qu'elles possèdent sur leurs clients et d'autres facteurs entourant les opérations afin de déterminer s'il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération, réalisée ou tentée, est liée à la perpétration ou à la tentative de perpétration d'une infraction de blanchiment d'argent.

Plusieurs indicateurs peuvent révéler des liens autrement inconnus qui, lorsque pris ensemble, constitueraient des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération, réalisée ou tentée, est associée au blanchiment des produits générés par des activités liées au cannabis illicite. C'est un ensemble de facteurs qui renforce un caractère suspect. Les indicateurs visent ainsi à aider les entités déclarantes dans leurs analyses et examens des opérations financières douteuses.

Indicateurs associés au cannabis illicite en lien avec des distributeurs en ligne non autorisés

Indicateurs possiblement associés au cannabis illicite en lien avec la culture, la transformation et la préparation

Déclaration à CANAFE

Pour faciliter le processus de communication de renseignements de CANAFE, veuillez inclure le mot-clic #ProjetLEGION ou #LEGION dans la partie G, Description de l'activité douteuse, de la déclaration d'opérations douteuses. Veuillez aussi consulter la page Déclaration d'opérations douteuses à CANAFE.

Coordonnées de CANAFE

Courriel : guidelines-lignesdirectrices@canafe-fintrac.gc.ca
Téléphone : 1-866-346-8722 (sans frais)
Télécopieur : 613-943-7931
Courrier : CANAFE, 234, avenue Laurier Ouest, 24e étage, Ottawa (Ontario), K1P 1H7, Canada

© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, 2022.
No de cat. FD4-29/2022F-PDF
ISBN 978-0-660-42933-5

Ressources

Pour obtenir d'autres renseignements sur le cannabis illicite, veuillez consulter les ressources ci-dessous.

Date de modification :